Raritan Bay Union

Dissidence de la North American Phalanx.
Quelques membres du navire amiral du fouriérisme américain désirent moins d'association. Ils quittent en 1853 la phalange du New Jersey pour fonder à peu de distance une nouvelle union, plus individualiste mais marquée tout de même par la construction d'un élégant phalanstère.

L’habitation collective de Raritan Bay Union transformée en académie militaire · prospectus de 1866

En 1852, la North American Phalanx connaît une période troublée. En plus des désagréments liés à la vie collective, des controverses opposent les membres. Le principal actionnaire, Marcus Spring, un négociant de New York, quaker, reproche à la communauté son manque de ferveur religieuse, d’activités intellectuelles et de liberté individuelle. Ce conflit aboutit à la scission de la célèbre colonie fouriériste.

En novembre 1852, Marcus Spring acquiert un superbe terrain de 110 hectares situé à l’ouest de Perth Amboy, New Jersey. Un mois plus tard, il organise une réunion à New York pour promouvoir son projet. Dès le printemps suivant, une société par actions est créée, des fonds sont réunis auprès d’investisseurs de New York ou Philadelphie et une trentaine de membres de North American Phalanx s’installent à Raritan Bay. La direction de la société est assurée par Marcus Spring et des proches tels George Arnold, son beau-frère, et Clement Read, l’époux de sa belle-sœur et ancien membre de la communauté Hopedale.

Raritan Bay Union est une « association partielle », communauté à mi-chemin entre l’association fouriériste et la société ordinaire – mais dans le projet, le nom de Fourier n’est jamais mentionné. Ils déclarent aspirer à la « combinaison et non à la confusion » (Noyes 1870, p. 488). Les membres de la communauté paient un loyer pour le logement et les services. Chaque branche d’activité est gérée de manière autonome par des individus ou des groupes et se doit d’être autosuffisante.

Un vaste et élégant bâtiment collectif est construit de 1853 à 1855 : de part et d’autre d’un corps central comprenant des salles de réunions et un restaurant (qui attire des clients de New York), s'élèvent une aile pour les logements et une autre dédiée aux services de l’éducation. Ces services sont dirigés par Theodore et Angelina Weld suivant des méthodes progressistes basées sur le principe de coéducation des enfants entre eux. L'école acquiert une grande réputation. La structure familiale traditionnelle est respectée et la vie communautaire n'est pas imposée aux membres. Les colons ont la possibilité de construire des maisons privées sur des terrains réservés à cet effet, tout en profitant des services collectifs : James G. Birney profite de ce droit tandis que Marcus Spring et son épouse vivent dans une maison qui appartenait à l’ancien propriétaire des lieux. La vie culturelle de Raritan Bay est dynamique ; elle est animée par les conférences de réformateurs de renom : Henry David Thoreau, Amos Bronson Alcott ou Horace Greeley.

La colonie rencontre rapidement des difficultés nées de l’absence d’objectif réel mais aussi de l’hétérogénéité de la communauté qui compte des familles riches avec leurs serviteurs, des travailleurs salariés employés pour la construction du bâtiment et des artisans, groupes qui ne partagent pas les mêmes tâches ni les mêmes conditions de subsistance, et des gens de confessions diverses. En 1856, Marcus Spring rachète la plupart des actions aux détenteurs du capital et transforme Raritan Bay Union en une entreprise privée, y compris les services d'éducation. L'ancienne communauté périclite en 1857. En 1861, lorsque la guerre de Sécession éclate, Marcus Spring décide d’y établir l’Eagleswood Military Academy.

Témoignages

Sources et références

Noyes (John Humphrey), History of American Socialisms, 1870, p. 487-489.

Honeyman Greene (Maud), « Raritan Bay Union, Eagleswood, New Jersey », New Jersey Historical Society Proceedings, vol. 68, n° 1, janvier 1950.

Fogarty (Robert S.), Dictionnary of American Communalism and Utopian History, 1980, p. 158-159.

Guarneri (Carl J.), The Utopian Alternative. Fourierism in Nineteenth-Century America, 1991.

Guarneri (Carl J.), « L'utopie et la "deuxième révolution américaine". Le mouvement fouriériste aux États-Unis, 1840 - 1860 », Cahiers Charles Fourier, n° 3, décembre 1992, p. 36-54.



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