Franklin Community

Ni tien ni mien.
La régénération sociale est aussi une affaire de langage. En 1826, pour effacer toute trace de l'ancienne société, les communistes de Haverstraw bannissent de leur vocabulaire les mots « tien » et « mien ».

Le site de Franklin Community à Haverstraw, New York · photographie Donald. E. Janzen, 1980 · Donald Janzen Collection, David L. Rice Library · © University of Southern Indiana

New York et Philadelphie ont de la sympathie pour l'idée des communautés coopératives autonomes de Robert Owen. Une Société pour la promotion des communautés existe à New York depuis le début des années 1820. Lorsque l'industriel britannique vient aux États-Unis en 1824, il tient des réunions publiques dans la grande métropole et la fondation exceptionnelle de New Harmony (Indiana) laisse espérer une grande transformation sociale du pays. La constitution de Franklin Community est publiée à New York en mars 1826. Les owénistes de New York se tournent naturellement vers l'Hudson River pour choisir un site. Ils acquièrent pour près de 18 000 $ une ferme d'une cinquantaine d'hectares à 50 kilomètres d'Haverstraw. Le domaine comprend deux maisons, une douzaine de dépendances, une scierie ainsi qu'un laminoir et un marteau mécaniques. Un New-Yorkais du nom de Jacob Peterson offre 7 000 $ pour permettre à la colonie de s'installer. George Houston, un Anglais athéiste comme Owen, est le plus actif des libres-penseurs engagés dans l'expérience. La communauté mère de New Harmony dépèche sur place Robert J. Jennings pour apporter son concours rationaliste aux colons de New York.

En juin 1826, Franklin Community verse seulement le tiers de la valeur du domaine nécessaire à la réalisation de l'acquisition, mais dès le début du mois de mai plusieurs familles se sont installées à Haverstraw et ont entrepris de défricher les terres. Elles croient pouvoir valoriser leur travail comme un apport de capital. Ce que ne permet pas la nouvelle constitution promulguée sans leur consentement au mois de juin ou juillet. Leur mécontentement est évident lorsque Houston et Jenning arrivent sur le domaine. Il n'est pas certain que les familles lésées adhèrent aux innovations déistes mises en pratique à Haverstraw : sécularisation de l'éducation, institution d'une Église de la Raison, encouragement au travail le dimanche ou citations de discours d'Owen sur la religion ou le mariage. Haverstraw attire 80 personnes, des artisans et des fermiers. La communauté est bien sûr égalitaire : tous les biens sont la propriété commune et chacun jouit des mêmes droits. Ils abolissent l'usage des termes « mien » et « tien ». Le dimanche ont lieu des conférences sur la morale, la philosophie ou l'agriculture. Leurs conditions d'existence ne semblent pas détestables, mais probablement faute de direction capable et de nouveaux moyens, l'expérience communiste s'achève au bout de six mois sans que les membres qui avaient financé l'installation de la colonie puissent récupérer leurs fonds. Certains, comme Jacob Peterson, participent à une nouvelle expérience communautaire à Coxsackie (New York).

Témoignages

Sources et références

Noyes (John Humphrey), History of American Socialisms, 1870, p. 74-77.

Bestor (Arthur), Backwoods Utopias. The Sectarian Origins and the Owenite Phase in Communitarian Socialism in America: 1663 - 1829, 1970, p. 202-203.



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