Economy

 BANCS D'UTOPIE / WE SIT TOGETHER / FRANCIS CAPE 

Persécutés en Allemagne, les harmonistes émigrent aux États-Unis en 1803. Ils fondent successivement trois villages : Harmony, New Harmony et enfin Economy, en Pennsylvanie, où la communauté prospère en attendant le retour du Christ.

Le village d’Economy, Pennsylvanie · aquarelle de Karl Bodmer, 1832 · coll. Joslyn Art Museum, Omaha, Nebraska

Lorsque le groupe commença à émigrer du Wurtemberg en Allemagne vers les États-Unis, il fit l’acquisition de terres à l’ouest de la Pennsylvanie où il établit le village de Harmony. La petite communauté y avait des maisons, une église, une école et des ateliers. Comme les membres avaient peu d’argent, leur chef, Johann Georg Rapp, le rassembla pour constituer un fonds commun. Le 15 février 1805, Harmony Society fut officiellement fondée et tous mirent en partage la totalité de leurs biens. En 1814, à la recherche d’un meilleur endroit où vivre, les rappites vendirent Harmony en Pennsylvanie et partirent à New Harmony dans l’Indiana. La communauté se déplaça encore une fois après avoir vendu New Harmony à Robert Owen : elle retourna en Pennsylvanie pour y créer une nouvelle colonie, Economy, où elle s’installa définitivement.
Les Harmonistes adoptèrent un style de vie inspiré de l’Église chrétienne primitive, fait de simplicité et de piété. En rejoignant la communauté, les Harmonistes lui cédaient tout ce qu’ils possédaient. Chacun travaillait avec les autres à la prospérité de la société et recevait en retour ce qu’il lui fallait pour vivre simplement et confortablement.
Le village d’Economy présentait une trame de rues orthogonales où se distribuaient les maisons – principalement des constructions en briques à un étage précédées de jardins soignés –, une église, une école, des magasins, des fabriques et des édifices communautaires. Quatre à six adultes, en général des membres de la même famille, vivaient dans chaque maison. Quand le célibat fut adopté par la plupart des membres et devint une coutume dans la société, on incita les couples mariés à vivre ensemble en tant que frère et sœur. Les relations sexuelles étaient déconseillées (sans être absolument prohibées), mais quelques naissances eurent lieu dans les années qui suivirent et aussi quelques mariages.
Chaque membre remplissait une fonction définie dans un métier ou une profession spécifique. La plupart des hommes effectuaient des travaux manuels ; les femmes travaillaient dans le textile et l’agriculture. Le développement de leur technologie et l’accroissement de leurs affaires les poussèrent à embaucher des ouvriers extérieurs à la communauté. Bien qu’à l’origine, Economy ait été conçu seulement comme une colonie agricole autosuffisante, le village fut une réussite économique grâce à la production de nombreux biens dans les ateliers de confection, la scierie, la tannerie, les celliers et la distillerie. Ils fabriquaient aussi une soie de grande qualité pour l’habillement. Les membres de la société portaient habituellement des vêtements simples, mais ils pouvaient se parer de soie fine les dimanches et lors des grandes occasions.
Les Harmonistes étaient millénaristes. Ils croyaient que le Christ reviendrait ici-bas pendant le cours de leur vie et qu’il instaurerait sur Terre un royaume de paix de mille ans. Dans cette attente, ils consacraient leur vie à la beauté et s’efforçaient d’établir l’harmonie sur la Terre. Ils créèrent un jardin floral communal, une réserve de cervidés et un labyrinthe végétal, ils aimaient la musique et ils fondèrent un musée de peintures, d’antiquités et de curiosités. Ils buvaient du vin et du whisky, mais s’abstenaient de tabac.
Frederick Rapp, le fils adoptif de Johann Georg Rapp, assistait son père dans la direction du groupe et gérait les affaires industrielles et commerciales de la communauté. Un conseil élu d’anciens était chargé de faire respecter les lois et les règles de la société.
Après la mort de Johann Georg Rapp en 1834, de nombreux membres s’en allèrent. Harmony Society prospéra néanmoins comme une communauté économique florissante. Mais l’affaiblissement démographique, dû à la fois à la pratique du célibat et à la réticence de plus en plus grande à accepter de nouveaux membres, ainsi que la dérive des aspirations religieuses vers des motivations économiques, ont été les causes du déclin de la société et finalement de sa dissolution. Les terres et les biens furent vendus par les derniers membres en 1906. Aujourd’hui, une grande partie des édifices conservés sont protégés par la Commission d’histoire et des musées de Pennsylvanie.

Témoignages

Sources et références

Cape (Francis), Bancs d'utopie. We sit together, Guise, Le Familistère de Guise, 2016.



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