La Charte du peuple est publiée en 1838 en Grande-Bretagne par l'Association des travailleurs de Londres ( London Working Men's Association), une association ouvrière formée en 1836 « pour parvenir, par tout moyen légal, à mettre toutes les classes de la société en possession de droits sociaux et politiques identiques ». Depuis le début du XIXe siècle, la demande de réformes est forte dans le royaume, que les exemples des révolutions françaises de 1789 et 1830 inquiètent. La réforme du Parlement de 1832 qui étend l'électorat de 366 000 à 650 000 hommes (18 % de la population mâle) ne donne pas satisfaction aux couches populaires de la société et aux radicaux partisans du suffrage universel. La Charte de 1838 présente six réclamations : le droit de vote pour tout mâle âgé de 21 ans ; le secret du scrutin ; des circonscriptions électorales de même taille ; la suppression de l'obligation d'être propriétaire pour être candidat au parlement ; l'indemnisation des membres du parlement en exercice ; des élections annuelles des représentants au parlement. Elle reflète l'aspiration à une démocratie véritablement représentative et à une moralisation de la vie publique. La Charte est acclamée à Glasgow dans un meeting réunissant 150 000 personnes ; une pétition de soutien qui recueille 1 280 958 signatures est présentée en mai 1839 au parlement. Devant la fin de non-recevoir de celui-ci, les chartistes se divisent en modérés et radicaux qui appellent à la rébellion. Des émeutes, parfois sanglantes, ont lieu dans plusieurs villes du pays. Le rejet en 1842 par le parlement d'une deuxième pétition portant 3 250 000 noms provoque une grève générale sévèrement réprimée. Malgré ces actions d'éclat, l'influence du chartisme décline, notamment après sa dernière démonstration populaire à Londres en mai 1848.
Mouvement de revendication politique de masse, le Chartisme prend aussi pendant une brève période des initiatives en matière d'expérimentation sociale. Après l'échec de la deuxième pétition de 1842, le leader chartiste radical Fergus O'Connor, arrêté à plusieurs reprises, met sur pied en 1845 la Chartist Land Co-operative Society. Le projet est celui de l'émancipation des classes laborieuses urbaines par leur installation en tant que petits cultivateurs dans des villages coopératifs ruraux, un socialisme agrarien. Avec les moyens d'une contribution modeste de plusieurs dizaines de milliers d'adhérents coopérateurs, la société chartiste acquiert des terres pour fonder seulement cinq villages. L'expérience ne touche que 250 des 70 000 souscripteurs et provoque de vives oppositions malgré les succès matériels de ses premières réalisations ; la société est déclarée illégale en 1851.
(Sources : Hardy (Dennis), Alternative Communities in Nineteenth Century England, 1979 ; « People's Charter », Taking Liberties. The struggle for Britain's freedom and rights, British Library, [En ligne], URL : http://www.bl.uk/onlinegallery/takingliberties/staritems/159peoplescharter.html, consulté le 18 août 2013.)